Le roman de Christophe Donner commence en 2020, quand il fait la connaissance d'un oligarque russe, Otto Zorn, magnat du numérique et grand collectionneur d'art conceptuel qui lui achète l'ensemble des fichiers vidéo du roman qu'il est en train d'écrire. Ces milliers d'heures d'enregistrement, capturées par un des logiciels de son ordinateur, contiennent ainsi l'intégralité du processus de création de l'écrivain. L'oligarque et l'écrivain viennent de créer le plus gros NFT (Non-funginble token) littéraire de la jeune histoire du métavers.
Ce livre n'est autre qu'une suite de La France goy pendant l'entre-deux guerres, avec une spirale qui tourne autour de trois axes : l'axe familial (le Dr Henri Gosset, arrière-grand-père de l'auteur), l'axe Léon Daudet et son fils Philippe (dont Henri Gosset fut le médecin), l'axe Pétain/De Gaulle.
Trois histoires oedipiennes où des fils tuent des pères...
Christophe Donner nous explique ici pourquoi Léon Daudet, le fondateur de L'Action Française, leader charismatique de l'extrême droite, royaliste, antisémite, antidreyfusard incorrigible, élu député de Paris, n'est jamais devenu le Mussolini, le Franco, le Hitler qu'il ambitionnait de devenir. Il raconte comment c'est le fils de Léon Daudet, Philippe, alors âgé de 14 ans, qui va briser cette ambition. Au terme d'une fugue des plus insensée, l'adolescent décide d'aller assassiner son père Léon Daudet en criant Vive l'anarchie ! Armé d'un revolver, il renonce en chemin et se tire une balle dans la tête. Mais par ce geste sidérant, sacrificiel, Philippe aurait sauvé les Français d'un fascisme européen qui, au milieu des années 20, n'aurait rien eu à envier à celui de ses voisins.
Ce livre virtuose frappe à la porte d'une histoire de France qui n'avait jamais été racontée de cette façon. Quant à savoir ce que faisait la grand-mère maternelle, à demi-nue, sur le bureau du Général, c'est le suspens par lequel l'auteur finit de tisser son intrigue, et maintient son mécène, et ses lecteurs, en haleine.
« Trente ans après L'Esprit de vengeance, qui évoquait mes sentiments envers mon grand-père, Jean Gosset, le temps était venu de chercher à savoir pourquoi cet homme s'était engagé dans la Résistance, qui le conduirait au camp de concentration de Neuengamme où il allait mourir. Les réponses, c'était son père qui allait me les fournir. ».
C.D.
L'enquête s'emballe quand un trésor est découvert dans les archives familiales : lettres, journaux intimes, articles de presse, manuel d'escrime, de la main d'Henri Gosset, le père de Jean. C'est l'étincelle qui fait exploser le réel, et le romanesque s'impose autour du personnage de Henri et de sa correspondance, qui nous font remonter à la fin du XIXème siècle, jusqu'aux racines de l'antisémitisme français et à son « patient zéro », Edouard Drumont. Si Henri Gosset, en arrivant à Paris, en 1892, à seize ans et demi, n'a pas rencontré l'auteur du best-seller haineux La France juive, il a en revanche très bien connu son disciple et successeur, Léon Daudet, le fils du célèbre écrivain. Léon initie Henri à l'antisémitisme et lui présente le professeur Bérillon, praticien réputé de l'hypnose, fondateur de l'Ecole de psychologie dont Henri devient un des professeurs et son trésorier. Mais les mauvaises fréquentations d'Henri ne l'empêchent pas de tomber follement amoureux d'une jeune institutrice anarchiste, Marcelle Bernard. De l'union de ces extrêmes naîtra Jean Gosset...
Léon Daudet, Edouard Drumont, Charles Maurras, les leaders anarchistes Gustave Hervé et Almeyreda, Clemenceau, Caillaux, le directeur du Figaro Calmette, Dreyfus, Zola, Jules Bonnot, Jean Jaurès et tant d'autres, c'est une humanité grouillante et furieusement vivante qui habite La France goy. La fresque couvre les deux décennies qui précédent la première guerre mondiale. L'époque est féroce, avec ses scandales (Panama), ses campagnes de diffamation contre les Juifs, les capitalistes dénoncés comme espions par L'Action Française, les procès, les grèves, les attentats anarchistes, et les duels au petit matin blême... Au carrefour de tous ces complots, la presse, corrompue par la politique et inversement, la littérature, le théâtre, et même du cinéma puisque c'est de cette tourbe que naîtra le cinéaste Jean Vigo. Avec ce roman, Christophe Donner suggère une histoire de France hantée par une « question juive » qui déterminerait plus que ce qui a été dit. Il découvre à travers la saga familiale une haine des Juifs, ancestrale, qui se réinvente en antisémitisme, se déchaîne, et participe à l'inexorable montée des nationalismes qui entraîneront l'Europe dans la Grande Guerre.
Dans Un roi sans lendemain, Christophe Donner revisitait l'Histoire monarchique de la France, à sa manière d'irrévérence. A quoi jouent les hommes est le roman-vrai de la folie du jeu, des courses, de l'argent qui circule, corrompt et vivifie la société. « Un roman historique ? dit-il. Mais d'une histoire insignifiante ayant glissé depuis longtemps dans l'oubli. L'histoire de France, ce monument de morale, je l'ai rayée comme une carrosserie de voiture ».
De l'ancien régime à nos jours, en suivant un arc de cercle qui va de l'invention du pari mutuel à la fièvre lasse des parieurs sur les hippodromes d'aujourd'hui, Christophe Donner a composé une fresque éblouissante, si vivante et charnelle que les personnages semblent s'en détacher en relief sur le devant de la scène : journalistes vengeurs folliculaires d'un jour, croupiers losers, luttes de pouvoir entre l'ancien régime de l'aristocratie et le siècle moderne du jeu organisé, dynasties d'entrepreneurs aux rêves sans limites, femmes offertes et d'autres inaccessibles, vengeances et passions suicidaires.
C'est une ronde, qui comme toujours avec Donner, lie le passé et le présent, l'un se nourrissant de l'autre.
« J'ai la satisfaction de pouvoir t'annoncer enfin, qu'à l'aide du perfectionnement de mes procédés je suis parvenu à obtenir un point de vue tel que je pouvais le désirer (...) L'image des objets s'y trouve représentée avec une netteté, une fidélité étonnantes, jusque dans ses moindres détails, et avec leurs nuances les plus délicates. » Nicéphore Niépce « Messieurs, je viens vous annoncer une bonne nouvelle : la voix humaine s'écrit elle-même. » Édouard-Léon Scott de Martinville En capturant l'image et en reproduisant le son, les inventeurs de la photographie et de la phonographie ont changé le monde. N'ont-ils pas pris le risque, aussi, de ressusciter les morts ? Sinon, par quel maléfice Nicéphore Niépce et Scott de Martinville ont-ils été privés de la gloire et de la fortune qui leur étaient promises ?
C'est le mystère de cet empêchement, caché dans leurs vies intimes, que dévoile ce roman.
Trois garçons forment depuis leur petite enfance une singulière fratrie.
Le jour de ses cinquante ans, paul lâche sur un ton badin: "est-ce que tu as eu des rapports avec jean-lou?" - et la chose cachée depuis la fondation de leur monde apparaît. jean-lou, c'est le beau-père, ex-soixante-huitard devenu mandarin d'une société qui lui assure l'impunité; il jouit de sa puissance, toujours sans entrave, sinon celle de l'âge et de la maladie. le cancer de sa femme est dressé comme une dernière injonction aux "libres enfants" de leur montrer respect, admiration, reconnaissance, et amour.
En vain.
Qui est cette femme retrouvée en morceaux au bord du fleuve ? Qui est l'auteur de cet indicible crime ? Atyka, jeune professeur de français, nouvelle conteuse de cette histoire, ne sait pas qu'en la racontant à ses élèves, elle signe son arrêt de mort.
Assia Djebar, à la manière d'une oeuvre symphonique, révèle dans cet ouvrage essentiel la violence qui déchire son pays natal depuis de longues décennies.
Les trois courtes nouvelles et les quatre longs récits qui composent l'ouvrage, écrits dans une langue sincère où l'esthétique et la réalité n'ont aucune complaisance l'une envers l'autre, traduisent avec force le désir de mettre à nu le quotidien tragique de l'Algérie. Plusieurs thèmes sont tressés qui composent les motifs de l'ouvrage : le poids de la conscience que révèle l'implication de l'écrivain dans ses récits ; le thème des origines car on découvre ici dans leur intimité des groupes sociaux, des familles, leur héritage, le bouleversement de leurs coutumes et habitudes, l'usage de leur langue et jusqu'à la manière dont elle est parlée ; le thème de la mémoire avec la présence incessante de la tradition malmenée par les événements ; le thème de l'imaginaire berbère, etc. Plus qu'un simple témoignage, Assia Djebar porte la parole de ses soeurs alarmées par la peur et l'effroi du danger constant. Cette oeuvre bouleverse par son authenticité, sa sensibilité et pour vous convaincre de la température dramatique du livre, lisez donc la brève histoire de "La femme en morceaux"...
Ils sont quatre, comme les Dalton. Quatre Français, un vidéaste, un photographe et deux écrivains, invités par un improbable « Festival du cheval » à Damas, en Syrie. Ils sont tellement flattés d'être parmi les rares Français à pouvoir fouler le sol de cette patrie ravagée par la guerre depuis huit ans, qu'ils sont prêts à tout pour assouvir leur passion du cheval. Prêts à ce qu'on les fasse passer pour ce qu'ils ne sont pas. Prêts à rencontrer les dignitaires locaux et avaler leurs discours patriotiques d'un autre temps. Prêts aussi à se laisser corrompre par le régime de Bachar el-Assad et à servir d'« idiots utiles », comme au bon vieux temps de Staline, Mao et autres Castro ? Là, ça coince un peu. Mais ils se croient protégés par l'ironie, par l'amour du cheval, ils ont la curiosité en guise de passeport, avec le visa inattaquable de l'impartialité. La réalité du pays va les entraîner dans un mensonge des plus loufoques au cours duquel la question se pose : est-ce qu'on a bien fait d'aller en Syrie ? Certainement pas... sauf si l'un des branquignols rapporte de ce voyage supposé servir la propagande du régime une sotie parfaitement incorrecte qui montre que le roi est nu...
« Ma méthode d'écriture, c'est de regarder les choses sans indulgence, avec cruauté s'il le faut, et d'insister jusqu'à ce qu'apparaisse le côté comique de ces choses... Je pousse le vice jusqu'à exiger de mon éditeur qu'il inscrive le mot roman sur la couverture de mes livres. Mais le réel est une eau qui s'infiltre partout. » Ainsi Christophe Donner nous parle-t-il de son dernier livre. Alors, vrai roman ou fiction apparente ? Bang ! Bang ! montre Martine Victoire dans tous ses états : une héroïne du cinéma populaire qui jure comme un charretier, s'ouvre les veines, boit jusqu'à en oublier les limites de la décence, ravage malgré elle sa famille et sombre dans des amours perdues. Le narrateur, mari désabusé de Martine Victoire, partage avec Christophe Donner sa passion hippique. Il décrit sans indulgence une coterie d'êtres humains qui tournent autour de Martine Victoire : un peintre misanthrope, un acteur adoré des jeunes tant pour sa beauté que par le supplice qu'on lui a infligé en lui enlevant un bras, une adolescente mûre qui accepte de voir sa mère, star déchue, dans les bras d'un pompiste trop beau... Mieux vaut aimer les chevaux.
Caustique, cruel, féroce, souvent très drôle, mais aussi d'une étrange tendresse, Christophe Donner poursuit ici la Comédie Humaine de nos contemporains.
Qui a tué l'enfant du Temple ? C'est la question que se pose aussitôt Henri Norden, quand on lui demande d'écrire le scénario d'un film consacré au fils de Marie-Antoinette et de Louis XVI. Principal suspect : Jacques-René Hébert, écrivain favori des sans-culottes et directeur du Père Duchesne, le journal le plus scandaleux et le plus célèbre de la Révolution. A l'heure où l'on pense avoir authentifié le coeur de Louis XVII, le tabou sur le destin de ce " roi sans lendemain " est-il vraiment levé ? La réponse est expiatoire. Si elle n'est pas dans le film de Norden, elle se trouve dans le roman de Donner.
Ce magnifique roman peut se lire comme une sorte de « Recherche du sexe perdu » contemporain, miniaturisé et recomposé.
Premier mouvement, une manière de « Temps retrouvé » dans une veine comique : les symptômes d'un écrivain hypocondriaque qui finit par se rendre vraiment malade de ne pas parvenir à achever son roman Sexe commencé il y a vingt ans...
Flashback « du côté de chez Moïse », de Sodome et de Gomorrhe : la rencontre avec Moïse, un jeune Mexicain avec lequel Christophe va traverser mille et une nuits de stupre et de luxure dans les boxons de Mexico, avant de ramener son trophée aztèque à Paris pour le « sauver ».
Succèdent « Le prisonnier » et « Moïse disparu » : l'amour-passion dans la claustration, la trahison, la jalousie, la rupture, le désamour...
Seul, libre et dévasté, Christophe rencontre une femme. Un autre amour, une autre sexualité: voici soudain, contre toute attente, « Le côté de Dora » ! Un corps de femme à découvrir, un mariage, une famille libanaise, une mère bigote qu'il faut emmener se faire bénir par la Pape... et les souvenirs de la prime adolescence qui resurgissent, avec les amis d'enfance détruits par leur ogre de père pervers.
Des backrooms de Mexico à Saint-Pierre de Rome, du crime pédophilique originel à la castration symbolique de l'écrivain valétudinaire, de Moïse à Dora, le sens de cette épopée tient tout entier dans un mot sans article et sans adjectif, qui mène le monde : Sexe.
Je ne m'attendais pourtant pas à ce dialogue entre Madame le Ministre et Joël Quiniou, mon oncle, mais au bout de deux ou trois minutes la conversation a glissé vers des choses très belles, très sensibles. - Je suis parfois tellement triste, a-t-il dit. Et en effet, on l'imaginait sur la pelouse de n'importe quel stade immense, avec cette foule hurlante qu'il n'entend plus, sa solitude et sa tristesse au moment où il vient de se rendre compte qu'il a fait une erreur. Ce qu'on appelle une erreur d'arbitrage. Mais il en va du football comme du reste : les injustices ne se rattrapent pas. Il faut rester le doigt tendu vers le ballon, intraitable, avec cette sensation, là, seul contre tous, cette sensation que j'éprouve moi aussi en écrivant toutes ces horreurs sur ma famille, sur mon oncle : l'exaltation du doute. Il s'agit aussi d'acquérir une certaine réputation. La réputation est une affaire de temps, rien de plus. Combien de temps a-t-il fallu à mon oncle pour faire comprendre aux footballeurs qu'il n'y avait pas d'arrogance dans sa manière de revendiquer ses fautes, mais au contraire une humilité extrême. Combien de temps et comment il a fait, voilà ce qu'il faut raconter.
« Les chevaux ne sourient pas, mais Karma des Êtres avait une sorte de sourire, c'était dans son allure, ce petit trot déhanché, avec une souplesse que je qualifierais de malicieuse... Je suis descendu jouer parce que j'en étais sûr, j'avais en moi cette densité de conviction qui ne me trompe jamais. » Christophe est doublement amoureux : d'abord de sa femme, Lucia, à qui il a irréalistement promis d'offrir un coûteux manteau vert pâle avec un col de vison, mais aussi d'un cheval, un trotteur malhabile, taillé en fer à repasser, nommé Karma des Êtres, en qui personne ne croit, sauf Christophe. Miracle de l'amour ? Comment acheter un manteau de 3000 euros quand on n'a pas le premier sou ? En conciliant le hasard du jeu et la puissance de la conviction ? Et si la passion était aveugle ?
Le récit de Christophe Donner, dont on sait qu'il est un amateur de courses et de chevaux, est une fable réaliste sur l'argent autant qu'une comédie menée au trot enlevé où les parieurs exaltés, les lecteurs de Paris-Turf, et les promeneurs des hippodromes ont tous le même rêve : gagner, enfin !
_ J'ai effacé tes empreintes, a dit mon grand-père. Tu n'as pas fait du joli travail, Charles. Avoir quinze ans ne constitue pas une excuse. Quand on accepte de faire quelque chose, on va jusqu'au bout... Quand j'ai tué mon premier Allemand, j'avais seize ans. Tu auras juste fait ça un an plus tôt que moi.
_ Je ne l'ai pas tué!
_ Ah nonoe C'est bizarre, parce qu'il ne respirait plus du tout quand je l'ai trouvé.
"me suis-je jamais révolté contre l'imagination ? non." né en 1956, aucun diplôme, christophe donner a débuté dans le cinéma comme acteur, puis comme monteur. il commence à raconter sa vie vers l'âge de vingt ans et publie son premier roman chez fayard, petit joseph.
Signant de nombreux livres pour tous les âges, il est déjà l'auteur d'une oeuvre très importante. on retiendra parmi la liste des volumes parus : giton, l'esprit de vengeance, les maisons, retour à eden et quand je suis devenu fou. avec contre l'imagination, il publie son premier manifeste littéraire.
« Je suis sorti de la maison au petit matin, j'ai marché à grands pas sous les platanes du cours Mirabeau, sans pouvoir m'empêcher de sourire.
Une chose m'apparaissait sûre et certaine : je n'étais plus le même. Je venais de passer la nuit dans le lit d'une femme, à l'embrasser, la serrer, la baiser, car si cette nuit n'avait pas été celle de l'accomplissement de l'acte sexuel, elle n'en avait pas moins été une nuit d'amour, entière, complète, jusqu'au petit matin frisquet, le reste n'était qu'une question de vocabulaire : est-ce que nous avions fait l'amour ? C'est ce qu'il me semblait puisque j'étais amoureux. » Christophe entre dans les années soixante-dix et dans l'adolescence bercé par les idées révolutionnaires de ses parents divorcés, entre qui il va et vient, et la découverte angoissante d'une sexualité dévorante, obsessionnelle. De Paris à Saint-Tropez en passant par la Tunisie, l'adulte qu'il est devenu égraine les souvenirs d'une jeunesse douce-amère à travers le prisme de ses aventures sexuelles.
De brefs chapitres qui sont autant de souvenirs, paysages, odeurs, mêlent la voix de l'enfant précoce et de l'auteur qui, quarante ans plus tard, observe avec tendresse et cruauté ce Christophe d'une autre époque. L'école, la famille, la révolution, les vacances, la mer. Autant d'éléments de décor aux scènes que se remémore Donner avec ce court récit, très intime, qui montre le film irréalisable de sa vie, entre 13 et 15 ans, quand l'amour s'apprenait dans les tourments du sexe.
Une fois encore, j'ai voulu en finir avec mon père, l'assassiner pour de bon. Je suis entré dans mon bureau. Il y avait cette histoire de maison de campagne, mon père avait acheté une ferme à cent cinquante kilomètres de Paris et tout de suite il avait parlé de s'agrandir, le mot hectare était sorti de sa bouche. En réalité, mon père ne voulait pas d'une maison de campagne, il voulait un domaine avec des collines, des bois, une rivière à lui, il voulait un royaume afin que son règne arrive, et moi j'ai été élevé comme ça, dans ce rêve de puissance, avec des marâtres, des fées, des saltimbanques, et quand j'écris des livres, chaque fois que je veux assassiner mon père, je me replonge dans cette époque merveilleuse, cette époque perdue où j'adorais mon père comme un seigneur..
Le narrateur ? Christophe Donner lui-même, qui écrit : "On dira que ce livre est narcissique : tant pis - si le narcissisme est l'art de se changer en fleur". On le trouve d'abord en Russie, où il commence un film : dernier défilé du 1er mai et "adieu" des communistes, description des lieux de drague, des tapins misérables, d'une pauvresse qui connaît Pouchkine par coeur, de la violence qui règne dans les boîtes de nuit, de la vie dans les kolhkozes... Après la Russie, l'Inde, ses ashrams, ses gourous - qui en prennent pour leur grade. Regards surprenants jetés sur une civilisation que, très souvent, on ne connaît que par ouï-dire. Mais pour le principal, le roman passe dans les lettres d'amour que Donner adresse à un Nicaraguayen resté à Paris. Un mot qu'il cite ici, de saint Augustin, pourrait le définir : "En effet, le poids entraîne le corps, comme l'amour entraîne l'esprit, où qu'il l'entraîne". De plus en plus, Donner apparaît comme un écrivain "scandaleux" chez lequel domine, de façon primordiale, le sens de l'éthique.
Né en 1956 à Paris, Christophe Donner est l'auteur d'une oeuvre importante et diverse où l'on peut citer, chez Grasset, L'Esprit de vengeance, Retour à Eden, Ma vie tropicale.
Le Livre :
Un enfant surdoué, handicapé par une hallucination qui fait de lui un handicapé de la vie auquel tout contact physique est interdit, est interné dans une institution spécialisée, puis part avec son père à Saint Tropez avant de revenir vers Paris où il s'affranchit progressivement des démons de son « roman familial ».
Comment le narrateur en arrive-t-il là ? Il est le fils bâtard de Freud et de Marx, de la psychanalyse et du communisme, d'un fléau intellectuel et d'un fléau social, de sa mère et de son père.
La religion de l'Inconscient et celle de la Révolution ont coulé dans ses veines depuis l'enfance : c'est cette double violence exercée sur lui, ce double mensonge meurtrier du siècle, qui constituent les véritables personnages du roman.
La révolte contre la tyrannie douce d'une mère psychanalyste passe par la dénonciation de l'escroquerie du freudisme ; l'apostasie de la religion du père communiste passe par le règlement de comptes avec la légende léniniste.
De sorte que l'extrême singularité du roman familial touche à l'universalité du roman générationnel. Roman total où l'on trouve de la drôlerie et de la sauvagerie, de la science et de l'histoire, une théorie de la morale et une pratique de l'auto fiction
La vie n'est pas un roman, ni sous les Tropiques. Le goût de l'aventure me conduit dans les bains turcs de Mexico, sous les fougères arborescentes des ruines mayas... Mesurées à l'aune de ces désirs, mes visions deviennent des découvertes. En face de chez moi, les enfants sniffent de la térébenthine, vautrés devant la maison de William Burroughs, là où il a tué sa femme. Ils rêvent d'avoir un chef, une histoire légendaire que je pourrais leur écrire, pourquoi pas.
Un peu plus tard, je demande à un sourd et aveugle ce qu'est la tristesse avant le mot tristesse. La senora Guadalupe avait besoin d'un miracle, et au lieu de le filmer comme elle me le demande, je le mets en pièces. Mais c'est très beau, très intéressant, les pièces d'un mensonge. Le film que j'en tire, Anatomie d'un miracle, c'est la preuve qu'il me manquait à verser au procès que j'ai depuis longtemps intenté à la fiction, à l'imagination. Quant à ma famille, je l'avais presque oubliée, il faut la démonter elle aussi, avant qu'elle me broie.
Au bout du compte, je voudrais me montrer assez cruel pour qu'on ne me pardonne rien, et surtout pas au nom de l'écriture.
On ne peut pas saisir la morale de cette entreprise si on lui assigne un quelconque projet. Il s'agit d'un réflexe très simple, tropique, qui s'appelle la vie.
Christophe Donner a quarante deux ans. Il vit à Mexico. Il est l'auteur entre autres, chez Grasset, de l'Esprit de vengeance (1992), Les Maisons (1993), Mon oncle (1995), Retour à Eden (1996), Forme d'amour n°3 ou 4 (1997).
Elias Chanoum a cent quatre ans. Arrivé à cette extrémité, il n'aspire plus qu'à une chose, vivre encore un peu. Ce n'est pas seulement un espoir, c'est un projet. Sa femme en a assez, elle voudrait que Dieu l'emporte, tandis que les enfants, les petits-enfants le voient comme une créature éternelle, n'ayant plus aucune raison de mourir. Ca va être à moi, son gendre, de trancher.Un conte cruel qui mêle la famille et ses hystéries, un centenaire bien valide et l'ambivalence de l'amour qu'on lui porte, les secrets de la mémoire, les haines ancestrales dans un pays éternellement en guerre, le Liban.
Belle amie d'aujourd'hui, Solange Morel conte non sans humour ses débuts télévisés.
C'est à onze ans, sur le plongeoir, que Solange découvre la virtualité de ses appâts, et la beauté promise de ceux qu'elle nomme non sans fierté « ses nichons ».
À dix-sept ans, Solange quitte sa Mayenne natale pour Paris, et devient Léa, « Léa Mettetal ». Plus que jamais confiante en l'avenir prometteur de son corps, Léa rejoint celui par qui tout aurait pu arriver. Il recherche des vraies jeunes filles d'aujourd'hui, « qui aient du chien ». Pour des photographies.
D'un homme à l'autre, Léa gravit les échelons, jusqu'à ses débuts à la télé. Esclandres, provocations, rires et larmes sont autant d'étapes vers la gloire d'une jeune femme qui, dit-elle, aurait pu être philosophe. Et qui jamais n'est dupe.
Léa entretient un rapport troublant à son image. Troublant, en cela qu'elle avoue ce qu'aucun ne reconnaîtrait : que nul ne peut se passer d'un miroir. Hors la beauté, point de salut en quelques sortes.
Né en 1956, Christophe Donner a débuté dans le cinéma comme acteur, puis comme monteur. Il commence à raconter sa vie vers l'âge de vingt ans et publie son premier roman chez Fayard, Petit Joseph. auteur de nombreux livres pour tous les âges, il continue le récit de ses aventures personnelles au Mexique, aux États-Unis, en Russie, en Afrique...