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krishna baldev vaid
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Sahira n'est pas son nom, pas son vrai nom, je ne sais pas si elle a un nom, un vrai nom moins encore.
Je suppose qu'elle n'a pas de nom - l'innommable. Ce n'est pas une supposition, c'est mon désir : je désire qu'elle n'ait pas de nom, qu'elle reste innommée, afin que je puisse la chérir sous tous les noms, la chérir indéfiniment, dans le secret de mon coeur, jusqu'à la fin. Je suppose qu'elle n'a pas de forme. Ce n'est pas une supposition, c'est mon désir : je désire qu'elle soit sans forme ; afin de pouvoir la contempler sous toutes les formes, la contempler indéfiniment, jusqu'à la fin.
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Mieux qu'une histoire d'amour, Lila est l'histoire de l'amour, l'histoire du couple où chacun aspire à se fondre en l'autre, tout en sachant que ce désir même de fusion condamne le couple. Drame à deux, l'histoire de Lila et du narrateur se joue sans autre partenaire.
Le livre est construit en trois séquences bien marquées : deux séquences narratives et descriptives, encadrant une longue séquence de dialogue. Lila est comparée à la célèbre Leîla de la tradition persane, cette amante qui forme avec Majnoun le parfait couple des amants mythiques, devenu en Inde aussi le symbole de l'amour fou.
Dans le dialogue s'évanouit une tension entre ordinaire et extraordinaire. Peu à peu l'abolition des différences aboutit à un duo lyrique, chacun parlant de la même voix et dans les mêmes formulations.
La troisième séquence est dominée par l'angoisse de la perte de Lila, cheminement qui conduit à poser la question de dieu.
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La faim,c'est le feu (bilingue hindi-francais)
Krishna baldev Vaid
- Asiatheque
- 5 September 2007
- 9782915255645
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Les deux pièces de K.B. Vaid ici présentées renvoient au spectateur, dans un langage très vif, quotidien voire populaire, les problèmes contemporains du sous-continent indien, et à travers eux les nôtres en cette période critique où le devenir de la Terre est en question.
La première, Famille en bataille, est étrange mais peut-être plus immédiatement universelle que la seconde dans la mesure où elle ne met en scène aucune figure allégorique de l'Inde - à l'exception peut-être du Vide, personnage muet et n'agissant que par son aura et son souffle.
Les personnages n'y ont pas d'autre nom que celui de leur position dans la configuration familiale, le Mari, la Femme, les Enfants, et les Autres, deux rôles en un acteur, représentant l'amant et la maîtresse.
La seconde, Notre vieille dame (2000), met explicitement en jeu l'allégorie de Mother India pour en déconstruire tous les traits, mais elle en appelle plus largement au sentiment de déshérence qui caractérise la jeunesse du 21ème siècle en Inde. Refusant cette mère (leurs traditions nationales, leur passé, leurs liens) en même temps qu'ils ne parviennent pas à s'en détacher et finissent par rêver d'en exploiter le potentiel symbolique pour faire de l'argent, les cinq comparses (3 hommes, 2 femmes, pas autrement nommés que par leur ordre et leur sexe) s'interrogent sur leur lien avec la vieille femme anonyme abandonnée, sur leur propre lâcheté, leur concupiscence, la colonisation et ses restes, et pour finir sur la nature humaine et la politique de l'histoire.
Les deux pièces ont une rythmique analogue : Dans Famille en bataille, après la montée fiévreuse des accusations des uns et des autres, la dernière séquence reprend terme à terme la première, imprimant un mouvement cyclique à la temporalité qui évoque le thème philosophique de l'éternel retour. Dans Notre vieille dame, après la montée des spéculations et des récriminations, le retour à la question initiale débouche sur un final lyrique évoquant la fin du monde comme dans le final du Mahabharata.
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Un village du Panjab à la fin de l'ère coloniale.
Sikhs, musulmans et hindous cohabitent tant bien que mal. Un jeune garçon, Birou, raconte sa vie, les hargnes et les affections, les alliances et les trahisons, les épisodes saugrenus, les personnages truculents qui font de son microcosme villageois le reflet d'une civilisation. Avec en fin de parcours la guerre, les massacres, la tragédie. Le grand roman de la partition de l'Inde. Une fresque baroque, qui rappelle le "réalisme magique" cher aux Sud-Américains.